
Emmanuel Petit
Associé-Gérant, Responsable de la Gestion Obligataire
Le premier trimestre 2024 a été propice à de nombreux ajustements sur les marchés de taux. En début d’année, le consensus anticipait six à sept baisses du taux directeur aux États-Unis en 2024, conforté notamment par un discours plutôt accommodant du président de la Fed (1). Cette perspective s’est toutefois rapidement heurtée à une inflation supérieure aux attentes, avec des chiffres mensuels dépassant les 0,4 % sur le CPI (2) en février et en mars (3). Après un point bas atteint en début d’année, les taux longs sont ainsi remontés tout au long du trimestre.
En Europe, alors que les attentes pointaient vers une baisse du taux directeur dès mars, la probabilité qu’elle survienne en juin semble désormais davantage d’actualité et ce, en dépit d’une inflation services à 4 % tirée par le marché de l’emploi (4). L’affirmation que la BCE était « data-dependant » et non « Fed-dependant » par sa présidente incite même certains investisseurs à considérer l’éventualité d’un découplage entre les politiques monétaires des deux institutions. La BCE pourrait ainsi passer à l’action avant la Fed, une situation surprenante mais pas inédite.
Sur le marché du crédit, on notera la bonne résistance des actifs risqués, liée notamment aux surprises positives sur la croissance. De façon générale, l’ensemble du marché s’est plutôt bien comporté, tiré par la dynamique du secteur immobilier. Certaines fractures sont néanmoins apparues sur la partie la plus fragile avec un retour du risque idiosyncratique, illustré par des événements récents tels que SFR/Altice, Ardagh Glass, Atos et Intrum. En une semaine seulement, le segment CCC (5) a ainsi vu sa performance depuis le début de l’année réduite à néant. Ces tensions sont généralement annonciatrices de failles plus profondes, les risques spécifiques ayant tendance à se propager ensuite à l’ensemble du marché.
Par ailleurs, les primes de risque crédit se situent actuellement en deçà de leurs moyennes historiques des dix dernières années, notamment pour les catégories BB et B (6). Cette situation, bien que favorable aux emprunteurs, soulève des interrogations quant à sa soutenabilité et sur l’impact potentiel en cas de retournement du marché. Une compression des spreads entre les segments BB et BBB, mais aussi B et BB, est également observée. Cette dernière accroît la vulnérabilité du marché, notamment face à une volatilité accrue ou à des risques idiosyncratiques.
Sur le High Yield (7), la gestion du mur de la dette en 2026 demeure encore une préoccupation majeure. Depuis le début de l’année, les émissions totalisent près de 35 milliards sur le marché européen (8). De plus, le marché a été soutenu par une offre nette négative (-16 milliards sur les trois premiers mois de l’année) et la bonne performance des hybrides du secteur immobilier, un secteur qui avait largement sous-performé en 2023. La fenêtre de refinancement est donc ouverte, mais pour combien de temps ?
Ce contexte nous amène à remonter la qualité de crédit des portefeuilles et à rester vigilants vis-à-vis des risques de refinancement. Ainsi, nous réduisons l’exposition au High Yield et aux hybrides corporates. Sur la partie Investment Grade (9), nous cherchons des opportunités sur les notations A ou sur des titres non cycliques dans le haut du BBB.
Sauf détérioration des perspectives de croissance, le marché du crédit devrait se montrer résistant, comme depuis le début de la hausse des taux. Cependant, la combinaison de spreads(10) serrés et d’un contexte politique moins favorable aux États-Unis incite à la prudence. Il semble peu probable que l’inflation puisse retourner à la cible sans davantage d’effets négatifs sur l’économie mais le consensus mise clairement sur un scénario positif.
Nous estimons qu’il n’est pas pertinent de prendre ce risque. La compression des primes de risque entre les différentes catégories de notation permet d’améliorer la qualité de crédit sans dégrader le taux actuariel des portefeuilles. Il n’y a par exemple quasiment plus de spread entre les entreprises cycliques et non cycliques, le coût d’opportunité est donc quasi inexistant. En revanche, si le scénario « rose » ne se réalise pas, nous aurons des marges de manoeuvre pour investir.
R-co Target 2027 HY est un fonds crédit reposant sur une stratégie de portage des obligations jusqu’à maturité, investi dans des obligations de qualité High Yield (11) libellées en euro Cette stratégie de type “buy and hold” (12) s’appuie sur une sélection de titres dont l’échéance moyenne est comprise entre janvier et décembre 2027. Reposant sur les mêmes principes de gestion, R-co Target 2029 IG investit quant à lui, dans des obligations de toutes zones géographiques de qualité Investment Grade (13) libellées en euro. L’échéance des titres sélectionnés se situe entre janvier et décembre 2029. La période de commercialisation de ces deux fonds s’étendra jusqu’au 31 décembre 2024.