
Anthony Bailly
Responsable de la gestion actions européennes
Après la progression des marchés au mois de mai, en Europe, le mois de juin a été marqué par une volatilité accrue et une performance en repli. Un sentiment d’instabilité politique s’est en effet installé au sein du Vieux continent depuis les résultats des élections européennes et l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale en France qui a suivi. Le retour des craintes politiques et l’anticipation d’une montée en puissance des partis radicaux en France pénalisent donc les marchés européens qui sous-performent les indices américains et mondiaux en juin. Le MSCI World et le S&P 500 progressaient en effet respectivement de +3,3 % et +4,9 % et touchaient de nouveaux records, alors que l'EuroStoxx perdait -2,7 % sur le mois [1]. Trois secteurs seulement terminaient dans le vert : la technologie (+7,3 %), la distribution spécialisée (+3,7 %) et les médias (+0,1 %), tandis que la construction (-8,7 %) et les matières premières (-7,9 %) et l’immobilier (-7,4 %) souffraient le plus [2].
Largement impacté par le retour de l’instabilité politique, le style value [3] affichait une nette sous-performance sur le mois avec un repli de 4,4 % contre une hausse de 0,3 %1 pour le style croissance [4]. Alors que l’écart de performance entre les deux styles s’était considérablement réduit au cours des trois derniers mois, il est désormais de 6,7 % depuis le début de l’année à fin juin en faveur du style croissance1. La sous-performance du style value sur le mois s’explique, à la fois, par la sous-performance des secteurs cycliques value mais également par la très bonne performance du secteur de la technologie qui bénéficie toujours de perspectives favorables sur l’IA. Ce mouvement a eu pour conséquence d’augmenter les écarts de valorisations entre les styles. La valorisation du style croissance est désormais proche de ses plus hauts historiques à 22,4x en P/E [5], contre 9,4x pour le style value qui se rapproche, lui, de ses points bas historiques [6].
En juin, R-Co Conviction Equity Value Euro affichait en repli de 6,6 %, sous-performant son indice de référence de 3,9 % [7]. Cette sous-performance s’explique pour un tiers par un effet allocation, notamment via la sous-exposition du fonds au secteur de la technologie, et pour deux tiers par un effet sélection défavorable. Là encore, le fait de ne pas être investi sur SAP et ASML nous a largement coûté, mais notre surpondération sur des titres français qui ont particulièrement souffert dans les secteurs de l’automobile (Forvia) des banques (Société générale, BNP Paribas) ou des services publics (Engie) explique en grande partie cet effet négatif.
Outre la participation à l’augmentation de capital d’Alstom, nous avons opéré un seul mouvement au cours du mois de juin en cédant notre position sur Eiffage dans le secteur de la construction. Quelle que soit l’issue des élections, il est en effet peu probable que le groupe réussisse à étendre la durée de ses concessions autoroutières en France, ce qui était un des piliers du cas d’investissement. Nous avons en revanche décidé de conserver nos positions sur les autres titres français. Comme souvent le marché a fortement réagi à cet évènement inattendu, ce qui s’est traduit par une hausse marquée du spread [8] OAT/Bund qui s’est depuis réduit. Nous considérons que la forte baisses des titres français reflète le risque de voir un des partis d’extrême (droite ou gauche) obtenir la majorité absolue. Les résultats du premier tour semblent écarter ces scénarios. Ainsi, les expositions France de BNP Paribas et Société Générale sont limitées respectivement à 25 % et 40 % [9]. Une hausse des taxes sur les profits en France de 10 points aurait un impact BPA inférieur à 10 % pour chacune de ces banques9. La forte baisse de ces deux titres nous paraît donc exagérée. Dès lors, même si une majorité pourrait être difficile à trouver après le second tour, le fait d’éviter ces scénarios devrait rassurer les investisseurs à court terme. L’instabilité politique pourrait peser sur la croissance française à court terme, mais les éléments nécessaires à une dynamique positive pour les actions restent en place : le scénario d’une croissance faible mais positive en Europe reste d’actualité, la normalisation de l’inflation se confirme et la BCE a enclenché sa première baisse de taux. La sous-performance récente du style value, rendant sa valorisation encore plus attractive, présente une opportunité dans la mesure ou le scénario de rééquilibrage entre les styles devraient se poursuivre.