
Anthony Bailly
Responsable de la Gestion Actions Européennes
Les marchés actions ont terminé le premier trimestre de l'année sur une nouvelle note positive, ajoutant en mars une faible volatilité à une performance continue depuis fin octobre 2023. Le MSCI World et le S&P 500 gagnaient chacun 3,3 % supplémentaires sur le mois, pour des performances respectives sur le trimestre de +11,7 % et +13,3 %1. L'Eurostoxx n'était pas en reste avec un gain de +4,5 % en mars (+10,0 % sur le trimestre), aidé par un PMI Composite qui repassait la barre des 50 pour la première fois depuis mai 20232. Si la distribution spécialisée (+16,7 %) et les banques (+14,0 %) bénéficiaient de cet embellissement, l'immobilier (+8,4 %) était plus porté par le discours « dovish[3] » de la Fed que par l'évolution des taux d'intérêt, qui restaient élevés. De l'autre côté du spectre sectoriel, les biens de consommation (-0,1 %) et la distribution alimentaire (-2,5 %) étaient les deux seuls secteurs dans le rouge sur le mois, pénalisés notamment par Kering (-13,8 %) et Hellofresh (-48,5 %)1.
Si le marché a poursuivi son rally, la tendance en termes de style s'est, elle, relativement inversée. En Zone euro, le style Value1 surperformait en effet le style Croissance de +4,6 % sur le mois, ramenant sa sous-performance depuis le début de l'année de -11,5 points à -7,2 points1. Les ratios de valorisation des deux styles évoluaient cependant dans des tendances similaires (de 9,1x à 9,5x pour la Value et de 22,0x à 22,5x pour la Croissance), laissant la prime de la Croissance sur la Value à 137 %, proche de ses pics historiques. Au regard d'un environnement de taux qui a largement changé depuis 4 ans, cette prime, qui était aux alentours de 100 % lorsque le Bund était en territoire négatif, nous semble encore largement exagérée2.
Sur le mois, R-co Conviction Equity Value Euro gagnait 5,2 % et surperformait son indice de référence (Euro stoxx NR) de 63 points de base. Si l'effet d'allocation était très favorable, notamment en raison du poids des banques qui restent la première conviction de notre portefeuille (BNP +18,9 %, Bankinter +17,1 %, Intesa +14,4 %, Société Générale +10,6 % en mars), l'effet de sélection était décevant, notamment sur nos deux seules valeurs (CapGemini -5,1 %, STMicroelectronics -4,2 %) dans le secteur de la technologie, où les signes de ralentissement sont venus tempérer l'euphorie de ces derniers mois1.
En termes de mouvements, nous avons cédé notre participation dans Mercedes. Même si la politique de distribution de cash a aidé le titre depuis le début de l'année (+18 %1), la concurrence chinoise de plus en plus menaçante sur son segment de marché et l'essoufflement du « pricing power1 » d'une façon générale nous ont conduit à considérer d'autres opportunités d'investissement. En ce sens, nous avons accru le poids de Forvia dans le portefeuille, considérant que la baisse du titre depuis le début de l'année (-35,5 %1) était une opportunité au regard de l'amélioration opérationnel du groupe, des mesures de restructuration renforcées, de la diversification de sa clientèle et d'attentes basses du marché sur l'évolution des volumes du marché automobile global. Ce titre est, par ailleurs, très sensible à l'évolution des taux en raison de son niveau d’endettement, ce qui pourrait être bénéfique dans le contexte de desserrement des conditions monétaires à venir. Notre vision plus constructive que le consensus sur l'évolution des prix du gaz et du carbone nous a également amené à renforcer notre conviction sur le secteur des Utilities via RWE.
Le scénario de rééquilibrage entre les styles que nous évoquions le mois dernier s'opère donc au fur et à mesure que les perspectives économiques s'améliorent. Il devrait se renforcer lorsque le momentum positif que l'on constate sur les « soft data » se transmettra aux « hard data » macroéconomiques et micro-économiques. En ce sens, les attentes de croissance de BPA1 sur certains secteurs Value (Banques, Energie, Matières Premières, Utilities) restent encore très modestes et sont susceptibles d'être révisées à la hausse au fil de l'année. Au regard des ratios de valorisation que nous avons déjà évoqués, le scénario de baisse de l'inflation et de bonne tenue de l'économie qui semble se confirmer nous semble donc déjà intégré au pan Croissance du marché, mais pas du tout au pan Value qui continue de se traiter sur des niveaux à peine plus élevés que lors des dernières crises. Si le marché actions devait bénéficier du retour des flux qui ont été alloués en monétaire sur les dernières années, il nous semble donc opportun de reconsidérer l'attractivité du style Value qui pourrait donc coupler à la fois révisions de BPA et re-rating.