
Anthony Bailly
Responsable de la gestion actions européennes
Les marchés actions ont été particulièrement volatils sur le mois passé, Donald Trump ayant mis le feu aux poudres lors du Liberation Day du 2 avril. Les annonces de tarifs douaniers plus punitifs que prévu ont suscité de fortes craintes d’un ralentissement du commerce international. Cela a ravivé le risque de récession aux États-Unis, propulsé le VIX à ses plus hauts niveaux depuis la crise du Covid et contribué à un vent de panique sur les indices actions en début de mois. Ces indices ont ensuite récupéré une grande partie de leurs pertes après l’annonce d’une pause de 90 jours dans la mise en œuvre des tarifs réciproques, à l’exception de ceux visant la Chine, en vue de négociations. D'un point de vue microéconomique, la saison de publication des résultats du premier trimestre s'est révélée plutôt solide malgré le fort climat d'incertitudes. La plupart des entreprises européennes ont confirmé leurs prévisions, à l’exception de l’impact des droits de douane, dont l’évolution reste incertaine et difficile à anticiper. La défiance des marchés financiers face aux politique de Donald Trump a par ailleurs prolongé la dépréciation du dollar entamée début mars (-8,9 % sur 2 mois face à l'Euro)1. Au final, l’indice américain S&P 500 chutait de -0,7 % (et - 5,4 % en €)1 sur le mois, sous-performant les actions de la Zone euro, qui sont parvenues à se maintenir en territoire positif (Eurostoxx +0,3 % - Total return)1.
En tête des performances sectorielles, l’immobilier (+8,4 %)1 a été soutenu par l’assouplissement de la politique monétaire de la BCE et la détente des taux souverains européens. Le secteur de la construction (+6,2 %)1 a bénéficié lui du fort rebond cyclique sur la deuxième partie de mois, et restait privilégié dans la perspective du plan d’investissement allemand. Les secteurs de la distribution alimentaire (6,2 %)1 et des Utilities (+5,8 %)1 ont également tiré leur épingle du jeu du fait de leur caractère défensif et domestique. Du côté des plus fortes baisses, les craintes sur le cycle ont particulièrement pénalisé le secteur de l'Energie (-6,2 %)1, également marqué par les futures augmentations de production de l’OPEP, et les matières premières (-3,8 %)1. Enfin, les premières publications dans le secteur du luxe, à l’image de LVMH, ont mis en difficulté le secteur des biens de consommation (-3,5 %)1.
Ce contexte a de nouveau favorisé le style Value2, qui a accru sa surperformance sur le style Croissance3 de 1 point sur le mois pour atteindre quasiment 15 points depuis le début de l'année 2025 (+15.3 % pour la Value et +0.5 % pour la Croissance en Zone euro)1. La prime de valorisation de la Croissance sur la Value a ainsi reculé de 93 % à 88 % en avril, mais reste cependant largement au-dessus de ses niveaux pré-Covid (environ 65 %)1. La normalisation de cette prime doit selon nous se poursuivre, tant à court/moyen terme par la poursuite de la repentification de la courbe des taux qui doit soutenir les secteurs financiers, qu'à long terme par la redynamisation de l'activité en Zone euro via les plans de relance, structurellement porteurs pour l'activité industrielle de la zone.
Le fonds R-co Conviction Equity Value Euro a fait quasi jeu égal avec l’Eurostoxx, progressant de +0,2 % sur le mois d'avril1. Il surperforme son indice de référence de +2.2 % depuis le début de l'année1. Notre effet d’allocation a été positif notamment du fait de notre surexposition au secteur de l'immobilier et de notre sous-exposition aux biens de consommation. En revanche, notre sélection de titres a été pénalisée par le recul de -6.0 % de Sanofi1 du fait des incertitudes tarifaires pesant sur le secteur de la Santé. La belle performance des valeurs de Croissance SAP (+4.5 %) et L'Oréal (+12.8 %) a également pesé sur cet effet sélection de titres1.
Au cours du mois, nous avons diversifié notre exposition au secteur des télécoms via KPN, l'opérateur historique des Pays-Bas qui est un des rares marchés Telecom européens limité à 3 acteurs. Le titre doit ainsi bénéficier de cet environnement concurrentiel sain et de la fin du cycle de Capex pour faire croître sa génération de cash. Nous avons financé cet investissement en neutralisant notre pari sur Deutsche Telekom en raison de sa surperformance depuis 2024 et de son exposition au marché américain. Nous avons également constitué une petite position dans la société pharmaceutique allemande Fresenius, l'idée étant de nous diversifier sur le secteur de la santé et de renforcer notre exposition européenne. Enfin, nous avons également introduit en portefeuille l’acteur technologique Prosus, premier actionnaire de Tencent, éditeur de jeux vidéo et géant des réseaux sociaux chinois. Tout en restant dans la philosophie et les standards de notre style d'investissement Value, cette nouvelle position nous permet i/ de limiter notre sous-exposition au secteur de la technologie ii/ de jouer l'éventuel soutien au consommateur chinois via un potentiel stimulus iii/ d'être exposé à la thématique de l'Intelligence Artificielle via le principal concurrent des Etats-Unis sur cette thématique. Ces nouveaux investissements ont été financés notamment par la cession de notre position dans ProSieben, dont l'offre publique d'achat de MFE avait transformé la position en quasi cash.
En avril, les chiffres de PIB du premier trimestre ont souligné une certaine résilience en Europe et un ralentissement américain. Forte de son excédent d'épargne et des marges de manœuvre budgétaires allemandes, cette dynamique pro zone euro pourrait se poursuivre d'autant plus que l'économie américaine doit quant à elle chercher à réduire ses déficits. Fortement délaissés depuis l’invasion de l’Ukraine, les marchés européens retrouvent de l'attrait et commencent à bénéficier d'un retour des flux, qui reste pour l'instant embryonnaire. Attirés par des valorisations encore raisonnables et des facteurs de soutien macroéconomiques plus évidents, les flux internationaux pourraient accentuer cette tendance. Notre portefeuille est positionné pour capter cette dynamique, en s’exposant notamment aux secteurs clés de la relance européenne.